jeudi 5 mars 2009

Ah ! La communion ecclésiastique

Rencontré aujourd'hui un dignitaire ecclésiastique. Aimable avec moi. Sincèrement attaché à sa charge. Rien d'un révolutionnaire. Admettant que la liturgie doit retrouver toujours d'avantage le sens du sacré. Un homme d'Eglise très représentatif en somme. En clergyman gris. Avec moi qui ne porte pas de col, ça faisait une moyenne !

Son problème ? construire la communion ecclésiastique (on parle de "communion" tout court entre initiés). Ou ne pas la troubler.

Nous parlions à bâtons rompus depuis une vingtaine de minutes et j'eus l'impression, brutalement, que lui et moi, nous ne donnions pas le même sens au mot communion. Pour lui la communion c'est l'union à réaliser ou à conserver d'un presbyterium et de quelques dizaines de laïcs responsables. Une affaire de camaraderie. De respect mutuel. De consensus surtout. Pour moi, j'imaginais naïvement la communion à travers la doctrine classique des tria vincula, l'unité de foi, l'unité de culte et l'unité de discipline.

Il me paraissait que la foi ne se négociait pas. Quant au culte, l'unité existe, surtout si comme l'explique Benoît XVI le rit renouvelé et le rit classique sont deux formes, l'une ordinaire, l'autre extraordinaire, de l'unique rite latin. La discipline ? En tant qu'assistant d'un Institut de droit pontifical, il me semblait que j'en étais en quelque sorte a priori respectueux.

Surprise ! Le dignitaire en clergyman gris m'explique que la communion est toujours "à faire" entre nous. Il en a, lui, une vision toute personnelle voire personnaliste. La communion, selon lui, c'est l'échange réel - ou plutôt, parce qu'il y a peu d'échange possible, l'accord présumé - entre les personnes. C'est la collectivité en acte.

On peut penser qu'il y a là la vision d'un homme de terrain, d'un bâtisseur de communion.

Mais on peut se demander aussi s'il est possible de bâtir la communion, comme si l'Eglise était une collectivité purement humaine. Comme si, dans le consensus recherché, se trouvait nécessairement l'unité voulue par Dieu. "Si le Seigneur ne construit pas la maison, c'est en vain que travaillent les maçons". Oh ! Ils mettent du ciment ou du béton dans leurs constructions, qui s'élèvent aux yeux de tous. Mais ces constructions sont aussi "vaines" que le fut en son temps la Tour de Babel : In vanum laboraverunt. Ils n'ont pas "rien fait" ces ouvriers qui oublient la priorité des plans du Seigneur, mais ils ont fait "des riens", ils ont oeuvré "en vain", "pour rien".

Au-delà de la critique théologique, qui me semble nécessaire, on peut se demander ce que cette "gouvernance" qui a pour but le consensus peut produire de grand en période de crise. Mieux vaut la libre initiative du petit patron, toujours prêt à faire bouger les lignes, que le jeu trop lourd d'états majors qui ne fonctionnent que dans une perpétuelle reproduction du même.

Au fond, la grande question dans l'Eglise est celle du camarade Lénine : Que faire ?

2 commentaires:

  1. Communion, communion ? J'entends beaucoup ce mot en ce moment, tout le monde s'en réclame, tout le monde (je veux dire le monde que j'ai lu, avec lequel j'ai parlé, avec lequel je suis en relation) le revendique comme sien, le SIEN, pas celui des autres hein !
    Alors, en fin de compte que signifie ce mot ?
    Est-ce que tout le monde s'accorde sur ce qu'il signifie ?
    Un pavé dans la mare : allez donc faire un tour sur le site de golias, tombage à la renverse garanti...

    RépondreSupprimer
  2. Mon Père, je vous propose comme clé de lecture de remplacer communion par empathie religieuse quand c'est un néo-catholique qui parle. (Je dis bien empathie - le voisin athée ou le facteur confucéen peuvent être très sympas mais il s'agit d'autre chose.) Dans cette optique, ce qui importe, c'est d'être sur la même longueur d'onde question religiosité. On est "en communion" (éventuellement imparfaite) avec le type qui ressent pareil. Ce qui compte n'est pas ce qu'on croit, c'est comment on croit. Je dis "clé de lecture", c'est à dire que je ne prouve rien, et notamment pas que tel soit le sens qu'ils donnent à: communion. En attendant, ça explique qu'un évêque puisse vous dire que vous êtes certes en communion avec Rome mais pas avec lui, ou qu'un prêtre pense que la communion, ça se construit.

    Il faudra bien un jour redéfinir les termes, en commençant pas les plus simples. Une anecdote: un tout jeune diacre avait consacré son premier prêche à l'essence de la foi. A l'issue de la messe un ami de ses parents le félicite.
    - L'essence de la foi, il en faut!
    - Heu... comment cela?
    Le monsieur avait compris 'essence' dans le sens de 'carburant'.

    RépondreSupprimer