jeudi 27 juin 2013

Première réforme liturgique du pape François

J'emprunte cette brève au numéro de Monde et Vie qui va paraître. Elle me semble de nature à susciter l'intérêt de tous les metablogueurs :
Première réforme liturgique du pape François :

Elle est datée du 1er mai, elle a été promulguée le 19 juin dernier. Désormais, dans les prières eucharistique 2, 3 et 4 devra figurer la mention de « saint Joseph époux de Marie ». Rappelons que dans la Prière eucharistique n°1 comme dans le Canon romain traditionnel cette mention existe déjà. Elle avait été ajoutée par le pape Jean XXIII, à la demande des Pères canadiens de Saint-Joseph de Montréal, le 13 novembre 1962, au cours de la Première session du concile Vatican II. Voilà un subtil moyen de célébrer Vatican II ! Et de montrer la continuité entre François et Benoît, puisque le premier a promulgué une décision mise à l'étude par le second.
On se souvient que l'intronisation du pape François avait eu lieu le jour de la Saint-Joseph (19 mars) et l'on observe que ce document est daté du 1er mai. Ainsi peut-on dire que les deux fêtes de saint Joseph se trouvent honorées dans cette décision du 19 juin.

Qui est saint Joseph ? J'en ai parlé déjà sur ce Blog le 19 mars 2011. Le pape François le définissait le 19 mars dernier comme "le gardien" : gardien de la Vierge, gardien de l'enfant, gardien de la famille du Christ qui est l'Eglise. Saint Joseph est le conservateur par excellence. Comme tous les conservateurs, il n'invente rien, il ne crée ou ne procrée rien. Mais il veille. Et lorsqu'il faut partir en pleine nuit pour fuir le pouvoir totalitaire d'Hérode, c'est lui qu'on réveille. Il me semble que notre pape s'identifierait assez bien à ce saint conservateur. On peut dire de lui qu'il veille. C'est un veilleur au chevet de l'Eglise vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Par ailleurs, il n'a pas la prétention de déclencher une nouvelle Pentecôte à lui tout seul, comme tel de ses prédécesseurs. Il s'attache à faire au mieux avec ce que le Seigneur lui a confié. Et comme il est un peu machiavélien (selon les dires d'un ancien ambassadeur d'Argentine), il s'attache à passer pour tout sauf conservateur, alors que c'est ce qu'il est.

Pour le coup, je sens que certains d'entre vous sont déjà en train de fourbir leurs armes dialectiques pour m'estourbir. Attention à ce que l'on nomme "conservateur". Tout dépend de ce que l'on conserve. Lui conserve "le dépôt" comme dit saint Paul à Timothée. Il conserve ce qu'il a reçu du Seigneur, la grâce, sa vérité surnaturelle et les sacrements qui en sont les signes efficaces. Il ne conserve ni des fanfreluches vénérables, ni un mode de vie papal qui a ses rites inévitables. Ce qu'il conserve, par profession et par mission, c'est ce qui nous fait vivre - l'Evangile de la vie. Son conservatisme est révolutionnaire (ainsi qu'il l'a fait remarquer récemment, nous l'avons souligné ici). Je ne peux pas m'empêcher de trouver, en tout respect, que ce conservatisme révolutionnaire chrétien va comme un gant au péroniste qu'il n'a pas cessé d'être. "Le premier pape péroniste du monde" titrait avec orgueil la presse argentine il y a quatre mois. Eh bien voilà peut-être ce que cela veut dire "un pape péroniste" : un révolutionnaire conservateur.

Mais revenons au sens de cette réforme : ce petit ajout est une nouvelle manière d'affirmer dans la liturgie l'importance du culte des saints (dans le rite vénérable que je célèbre on a plein de copains célestes, avec deux listes d'apôtres et de martyrs : ça crée des liens de les appeler par leur nom chaque jour).

C'est aussi une manière, en nos temps tourneboulés, de rappeler l'importance de la famille et le fait que la famille ne repose pas seulement sur la sexualité ; c'est pour cela que l'on rappelle que Joseph est "l'époux de Marie".

C'est aussi et surtout une manière de rapprocher les deux formes du rite romain, dont on peut espérer qu'un jour - point trop éloigné - elles ne fassent plus qu'une. L'idée de "réforme de la réforme" tend vers cet idéal...

A cet égard, je me permets de reprendre gentiment l'abbé Aulagnier, qui, dans Item, insiste sur le fait que l'Institut du Bon Pasteur défend le droit de "déprécier le Novus Ordo Missae". Je ne sais quel titre l'abbé Aulagnier possède pour s'exprimer ainsi lui-même comme s'il était l'Institut, il peut bien penser ce qu'il veut par ailleurs, mais je crois, moi, que, quels que soient nos droits, nous avons, avant tout, en tant que catholiques, le devoir de tout faire pour rapprocher le rite nouveau du rite ancien. Il me semble que ce petit ajout de saint Joseph pourrait signifier le début d'une réforme de la réforme, comme il a signalé le début de la réforme liturgique lorsque Jean XXIII l'a ajouté au Canon en 1962. Jean XXIII avait osé toucher au Canon, on pouvait donc en changer, pensa-t-on à l'époque. Eh bien notre pape conservateur révolutionnaire a osé toucher aux nouveaux canons, en laissant intact l'ancien dont ils sont rapprochés. M'est avis que l'on n'a pas fini de toucher au Nouvel Ordo Missae : non pas pour le déprécier mais pour mieux l'apprécier dans ce que le pape Benoît XVI appelait la "continuité" de l'histoire liturgique de l'Eglise.

5 commentaires:

  1. Lafontaine Anne28 juin 2013 à 15:26

    je partage à mon frère qui le partagera lui-même

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  2. Je crois qu'il y a une très grande différence entre être le conservateur des normes et des valeurs chrétiennes ou, au nom desdites valeurs, des institutions qu'on a fini par croire consubstantielles au christianisme, et être le gardien des personnes et de ses frères, le patronage de ce pontificat à saint-Joseph relève évidemment de cette sainte Garde des chrétiens les uns par les autres et non pas du conservatisme révolutionnaire, le plus dangereux des conservatismes, l'islam politique ne se réclame de rien d'autre.

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  3. Je ne vois pas cela comme une reforme... Comme toujours, les gens se soucient d ´un ou deux mots...
    Cela pouvair bien signifier un principe de changement, mais je ne le crois pas. (peut-être?) Le veritable changement sera possible quand il y aura plus de prière, plus sincères dialogues, moins des interêts purement humaines...
    Pour dire autrement: Plus d´interêt pour le royaume de Dieu...

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  4. Bien entendu il ne s'agit pas d'une réforme mais d'une simple harmonisation qui vise à unifier les quatre prières eucharistiques. Je pense que lors de la rédaction des trois nouvelles prières il y a eu un oubli qui maintenant est réparé. Pas de quoi fouetter un chat. Il faudrait que les tradis comprennent que leur ère est passée. D'ailleurs j'étais à la messe samedi soir en France et le prêtre a récité la PE2 sans mentionner Joseph.

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  5. Je pense que la nouvelle encyclique de François Lumen Fidei* a plus d'importance que cette minuscule réforme.
    * analogie avec Lumen Gentium.

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